Axel, comme un trait de lumière, en ce mois d'Octobre Rose (texte de mon amie Renée)
OCTOBRE ROSE - OCTOBRE ROSE - OCTOBRE ROSE - OCTOBRE ROSE
PENSEZ À VOUS FAIRE DÉPISTER
Le mois d'octobre est le mois "ROSE", comme chaque année il encourage, les femmes mais aussi les hommes à se faire dépister du cancer du sein. Oui, malheureusement les hommes aussi peuvent être touchés par le cancer du sein, il le sont beaucoup moins que les femmes mais il y en a.
C'est le mois qui se pare de rose, "OCTOBRE ROSE" dans les rues de nombreuses villes et villages pour inciter les personnes au dépistage, voir ci-dessous :
Cet émouvant texte, a été écrit par mon amie Renée dont vous avez pu lire d'autres nouvelles, nous nous sommes revues avant les vacances et avons déjeuné ensemble. Toujours ravies de se retrouver et de discuter ensemble en se racontant nos dernières nouvelles, nos sorties, rire ensemble en se promettant de se retrouver rapidement. Je dois venir la retrouver, suite à son invitation, pour qu'elle me fasse visiter sa belle région et sa ville au bord de la mer.
Nous nous connaissons depuis quelques années maintenant, c'est elle qui m'a donnée le joli nom de "Ornella la dame Sarde", que j'ai gardée. Je savais que c'était quelqu'un de sensible, de gentil et d'empathique, ce texte sur ce jeune garçon qui s'appelle - s'appelait... "AXEL" ci-dessous me le confirme encore une fois.
Voici le lien pour re-découvrir ces textes qu'elle a écrit :
https://jaime-les-musees-et-les-vieilles-pierres.blog4ever.com/je-cours-ecrit-par-mon-amie-renee
MA CHÈRE RENÈE
IL Y A DES RENCONTRES
QUI MARQUENT TOUTE UNE VIE
COMME AVEC AXEL
AXEL, COMME UN TRAIT DE LUMIÈRE
Difficile d'écrire sur cette parenthèse de vie, que j'ai dû refermer sans en parler trop tôt, respectant ainsi la parole donnée. Aujourd'hui est revenu un autre printemps, alors se décèlent les mots. Une si courte histoire, mais si intense, si importante à jamais, qu'elle méritait ces longs silences.
Montpellier. Le vent, qui fait tourbillonner les aiguilles des pins du parc et force à courber la tête. Le calme, quand la lourde porte à glissières s'est refermée. Voix basses des patients, échangeant leurs confidences...
J'ai failli trébucher sur d'interminables jambes, qu'un endormi aux longues mèches en bataille à allongées négligemment. J'y donne un léger coup de pied, sans lever les yeux : l'ensommeillé ne réagit pas.
Carte, ticket... J'attends mon tour, comme chaque semaine, la tête perdue dans mes nuages. Une bouffée d'air brutalement : la porte s'ouvre et le grand escogriffe sort. Prendre l'air, pour sortir de sa léthargie ?
Revenue au présent, je détaille alors cette silhouette déployée - c'est le mot - bras ouverts dans le vent, arpentant les allées, enveloppée dans une longue gabardine noire, une longue écharpe rouge à bout de bras : il ne fait pourtant pas si froid.
Une rafale brusque : l'écharpe s'envole et le dégingandé court derrière, remuant la tête si comiquement que je réprime un rire. Et tout à coup, les mèches s'échappent de leur sommet : la perruque s'envole, rattrapée d'une main vive.
J'ai détournée les yeux, très vite, tout en l'épiant en coin : il a eu le temps de la replacer et rentre aussitôt retrouver son siège. Désormais il est bien réveillé ! En relevant la tête, je vois enfin son visage : traits fins, juvéniles, longues bouche, grands yeux profonds : à peine majeur, sans doute. Je remarque aussi le désordre de la coiffure, mal assuré et complètement de travers sur le front.
Mon inspection est repérée : le regard posé sur moi est interrogateur, agacé aussi : alors je fais des signes, tentant de faire - en vain - corriger le déséquilibre capillaire. Le message ne passe pas. Alors je me lève et viens doucement le lui souffler : correction immédiate, air confus.
Je retourne à mon siège. De loin, le distrait me remercie et lève soudain sa perruque, d'un geste ample de salut. Pour le coup, je ris et, sans réfléchir, je lui rends la pareille, laissant voir mes quelques poils de duvet jusque-là bien planqués eux aussi.
C'est l'éclat de rire mutuel nous voilà cibles des regards curieux et réprobateurs. Toujours riant, nous battons en retraite vers les sanitaires proches, réajustant devant les miroirs nos coiffes d'emprunt, en nous appliquant.
De retour en salle, le grand jeune homme vient s'asseoir près de moi, tendant une longue main fine, en se présentant : Axel. Je décline aussi mon prénom.
Nous sortons pour faire plus ample connaissance et pouvoir, comme le dit Axel, parler plus haut et se connaître un peu plus. Il accompagne Geneviève, sa maman. Grand-mère fait le chauffeur, puisque lui ne conduit pas. C'est le dernier rendez-vous de traitement. Les phrases sont brèves, les mots courts.
DANS LA NUIT LES ANGES
NOUS DONNENT RENDEZ-VOUS
DANS NOS RÊVES
Du coup, je copie ce débit restreint pour résumer ma présence ici. J'apprends qu'il venait tous les trois chaque semaine. Comme moi. Mêmes protocoles. Pour lui aussi. Mais alors ? Il répond sobrement qu'il est traité ici - son bras désigne les hôpitaux alentours - depuis l'enfance.
Mais, désormais retournés à la famille maternelle catalane, ils ne reviendront pas. Ses soins, à lui se poursuivront là-bas pour éviter trop de fatigue. Et laisser souffler maman, ajoute-t-il. Nous regagnons la salle d'attente quand mon porte-documents s'ouvre et laisse échapper tous les dossiers médicaux si bien classés... Il a un grand éclat de rire, à nouveau et m'aide à remettre en place les feuillets éparpillés.
Le rire d'Axel ... J'ai souvent entendu l'expression "rire clair" mais celui-là ... c'était comme une source jaillissante, vraiment, comme une musique joyeuse.
Chacun, à l'intérieur, reprend sa place. Geneviève est revenue, suivie par une imposante vieille dame dont l'âge doit être frère du mien ! Ils partent vite ; Axel s'est retourné pour agiter gentiment la main. Moi aussi. Puis, j'ai suivi l'infirmière ...
Avant mon retour pour ce "là-bas" éloigné, la dame de l'accueil me parle de ces trois inséparables. Je me promets de n'en rien dire.
Durant le trajet, j'ai souri en évoquant cette rencontre : j'ai laissé à ce tout jeune homme mon numéro de portable, il avait "plein de choses à me confier pour SE dire" comme il le formula.
Téléphone. C'est Axel. Bref et concis : il rentre prochainement dans une clinique - catalane désormais - pour un nouveau protocole de soins. J'efface le numéro. Comme promis. Et j'attends.
Les jours qui ont suivi ont été ensoleillés de ses appels : tout a été prétexte à sourire, à rire : les livres qu'il a lus, les airs qu'il a écoutés sur un antique baladeur qu'il porte tout le jour en tour-de-cou. Nous aimons les mêmes auteurs, les mêmes musiques, jusqu'au chanteurs que l'on n'entend plus ! ...
On était faits pour se rencontrer. Tu es ma "dame d'écoute".
Ah bon ? Eh bien d'accord ! Je préfère à "dame du temps jadis". Mais toi, tu as vraiment des goûts qui datent !
Son rire, à nouveau, comme un soleil ! ☀️
Peu de temps après, il m'a demandé de venir lui rendre visite à la clinique. Ce bâtiment, cet étage-là, je connais bien. Il me fait peur.
J'ai apporté - à sa demande - les textes que mon imagination me souffla. En échange, il me remet un CD. Autre support obsolète. J'en suis émue sans le dire. A lui rendre. Sans rien copier, surtout : je promets, demandant la réciproque. Il est assis sur ce lit blanc et je vois de plus près ce visage, plus creusé que dans mon souvenir ... Sa longue écharpe rouge est drapée sur son crâne et ses sourcils sont dessinés savamment au crayon (œuvre de son infirmière préférée, Emma). Je lui souffle.
Tu ressemble au "Petit Prince de Saint-Exupéry", mais adulte.
Il sourit.
Je prépare moi aussi mon départ ... ne fais pas ta mine triste, toi, tu as le temps ! Maman aussi.
Et tu sais ça comment ?
Je le sais, c'est tout. Moi, je suis né pour un cycle abrégé. Ne proteste pas, c'est comme ça (les longs bras font des moulinets). D'abord on n'y peut rien et puis, j'ai une belle vie, c'est une chance, tu sais !
J'ai écouté en silence - j'étais là pour ça - ce grand garçon l'évoquer, cette vie, riche surtout de joies, de douceurs, de rires autant qu'il l'avait pu. L'amour exclusif que lui vouent "ses deux femmes" comme il les nomme, ne lui pèse pas : "Elles sont mes appuis, mes piliers".
Jamais il n'évoqua d'autre famille. Ni d'amis. Et je ne demandai rien.
Je suis revenue une autre fois. Croisant même sa maman et Granny (je l'avais baptisée ainsi, à la joie d'Axel que le mot amusait). Salut silencieux au passage.
Il leur a parlé de moi. Elles acceptent mes visites - mais en leur absence seulement - Je comprends.
Un peu de temps encore, après : nous parlons : lui de mes textes (j'aime bien dit-il). Moi de sa musique : j'ai écouté le CD incomplet de piano, dont il jouait jusqu'à ce que ses doigts ne puissent plus se plier. Moi aussi, j'aime. Beaucoup même.
"Merci d'avoir su m'écouter" dit-il encore. J'ai acquiescé et suis partie très vite.
C'est un message qui m'a prévenue de ne pas revenir : "Trop faible".
Et le tout dernier, effacé depuis, avec le numéro : "Décollage réussi". 🙏 C'est Emma qui l'a rédigé. A sa demande.
C'est elle encore qui m'a demandé de passer à la clinique et m'a remis un paquet léger et volumineux "de la part de sa maman".
J'ai attendu le soir, pour le déballer : il y avait la longue écharpe de laine rouge. Son écharpe.
J'ai eu envie de la garder, mais j'avais promis à ce Jeune Prince, de passage dans mon hiver, de ne rien garder. Cela m'a pris plusieurs jours avant de me décider.
Dans le grand parc, pas trop loin, les élagueurs taillaient les pins ; j'ai remis l'écharpe à celui qui m'a paru le plus apte à comprendre ma demande : l'accrocher à une branche, la plus haute, pour que les oiseaux seuls en détachant les brins que soufflera le vent.
Je ne suis pas revenue vérifier si ma requête incongrue a été exécutée : j'aime à le croire ... Au printemps, lorsque sont revenus hirondelles et martinets, peut-être - sans doute - leurs nids ont-ils été tapissés de ces brins de laine douce ...
J'ai croisé une fois seulement Geneviève et sa mère : au retour d'une flânerie perpignanaise, une main s'est posée sur mon épaule :
Ne vous retournez ; c'est Granny ; vous savez, j'aime bien ce mot.
Deux rires légers et les pas se sont éloignés. Voilà. La parenthèse Axel s'est fermée. Toi qui lis, retiens que je ne suis pas triste en pensant à lui, et à ces deux-là. Pas de mélo avait dit le "Jeune Prince de Courte Vie", pas de larmes. "N'écris pas de quoi faire un livre (rires). Raconte un tout petit peu, si tu veux. C'est tout."
J'ai recherché sans succès le nom de l'auteur de cet air de piano qui avait enchanté mon oreille : las, mon inculture classique ne m'a pas permis de le retrouver. Tant pis. Lui aurait dit mieux : pas de nostalgie !
Impossible pour moi de qualifier cette période-là : ce fut une bienheureuse pause, que ces heures précieuses et pures. Une sorte de paix. Depuis, je poursuivis ma route, comme le dit Axel. Il en fut plus sûr qu'il ne m'arrive parfois de l'être. Mais son goût de la vie, si courte qu'elle ait pu être, sa joie, ses rires, ses émerveillements, me servent d'exemple. "La Dame d'écoute" s'applique à être à la hauteur, ainsi qu'il me le demanda.
Certains jours, quand il fait trop sombre au-dedans de moi, je m'éclaire à sa lumière.
Renée, mai 2018, "quelques temps après".
UNE PENSÉE AFFECTUEUSE POUR LE JEUNE AXEL
"JEUNE PRINCE DE COURTE VIE"
POUR TOUS LES MALADES QUI SE BATTENT
POUR CEUX QUI ONT GAGNÉ CETTE BATAILLE
POUR CEUX QUI ENCORE SE BATTENT
ET POUR CEUX QUI L'ONT PERDUE HÉLAS
COMME MA MAMAN ET D'AUTRES PERSONNES
DE MA FAMILLE ET AMIS (IES) CHERS
Voici une jolie sonate au piano que j'aime beaucoup, je la dédie au "Jeune Prince de Courte Vie" comme tu appelait Axel ma chère amie "Renée La Dame d'écoute". Qu'elle arrive jusqu'à lui, qui vole de ses jolies ailes d'Ange.
Cette reprise pour piano de "Passacaille de Haendel", un magnifique chef-d'œuvre baroque, ce ne sera surement pas celle qu'il aimait écouter mais, il apprécieras peut-être ... Une pensée aussi pour sa maman et sa Granny, et surtout pour toi ma chère Renée, tes écrits sont toujours très émouvants, on se voit très bientôt, je t'embrasse.
OCTOBRE ROSE - OCTOBRE ROSE - OCTOBRE ROSE - OCTOBRE ROSE
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